Yvain passait de
magnifiques journées près de Laudine, d'ailleurs il ne la quittait
plus. Lunete s'était prise d'une grande affection pour le lion et elle
le cajolait sans cesse. Il n'avait même plus besoin de chasser car elle
lui faisait apporter de la viande fraîche. Toute la journée, ils
buvaient et mangeaient en écoutant les vers que leur récitaient les
poètes. Ils s'habillaient de soie et la Dame portait des bijoux de
grande qualité, ornés de pierreries finement ciselées. Les étoffes
de soie couvraient les murs. Les jeunes filles dansaient au son des flûtes
et des chalumeaux, tandis que d'autres jouaient du tambourin ou des
cymbales. La Dame s'habillait chaque jour d'une parure nouvelle pour
rivaliser avec ses demoiselles de compagnie.
Mais voilà qu'un
jour, au lieu des gazouillements habituels des oiseaux, monseigneur
Yvain entendit un roulement de tonnerre effroyable. Par sa fenêtre, il
vit la pluie qui tombait soudainement et formait déjà dans le jardin
de grosses flaques.. Puis le vent se déchaîna tellement fort que monseigneur
Yvain sentit bouger le sol sous ses pieds. On aurait cru que la terre se
craquelait sous les tourbillons de la tempête. Le vent pénétrait par
les fentes des murs et des fenêtres et éteignait les chandelles. Les
arbres du jardin s'écroulaient les uns après les autres dans un fracas
terrible.
Yvain entendit
des cris d'épouvante qui venaient de la grande salle. Vite, il
descendit et trouva Laudine et ses demoiselles terrifiées. Une telle tempête
ne pouvait avoir été déclenchée que par la fontaine.
" Vite,
cria-t-il à ses valets, apportez mon équipement !" Le lion
accourut, lui aussi avait compris qu'un provocateur avait touché à la
fontaine et il voulait absolument accompagner son maître. Les valets
s'activaient : pendant que l'un présentait le haubert à Yvain et l'autre
le heaume, Laudine le pressait de conseils. Quand on lui eut donné
l'écu et la lance, il monta sur le destrier qu'on venait d'amener.
C'est à peine si monseigneur Yvain pouvait voir son cheval, malgré les
efforts des servantes pour maintenir les bougies allumées. On abaissa
le pont et il partit au galop en éperonnant son cheval. Quand il fut
presque arrivé à la fontaine, le beau temps revint. Les oiseaux se
remirent à chanter dans les arbres.
Monseigneur Yvain
se posta devant la fontaine et vit son adversaire : sa lance paraissait
très solide, mais ce qui étonnait le plus Yvain c'était qu'il avait
lui aussi un lion ! Yvain regarda son propre lion qui fixait l'ennemi
avec mépris et retroussait ses babines en montrant des crocs
menaçants. L'autre animal se comportait pareillement. "Par Dieu,
lança Yvain, d'où te vient ce lion ?" L'autre fit reculer sa
monture mais ne répondit pas. Monseigneur Yvain s'énerva et cria :
"Vassal ! aurais-tu peur de te battre ?" Le chevalier recula
encore. Yvain pensa alors qu'il n'aurait peut-être pas besoin de se
battre, et cela ne l'aurait pas gêné, maintenant qu'il était habitué
à la vie tranquille du château. Mais le chevalier, en fait, avait pris
de l'élan...
Il s'élança sur
Yvain. Celui-ci en fut surpris
et son écu se fendit. Aussitôt, il riposta et déchira les mailles du
haubert de son adversaire, qui le fit alors tomber de cheval. Yvain
sortit son épée et la pointa vers l'autre qui était descendu de sa
monture. Le sang coulait à flots et les deux lions avaient de la peine
à se retenir pour ne pas aller aider leurs maîtres. Yvain perdait peu
à peu le dessus car l'autre était jeune tandis que lui s'était
habitué à la vie des nobles. On servait tant de délicieux et copieux
repas là-bas qu'il n'était plus aussi leste qu'avant. Yvain n'avait presque plus
la force de lever son épée et son adversaire allait l'achever.
Soudain, le lion d'Yvain attaqua ; à son tour, le second félin se jeta
dans la bataille. L'adversaire, sous les griffes du lion de monseigneur
Yvain, se mit à siffler. A ce signal, son propre lion se jeta sur Yvain
et le déchiqueta. Quand le lion d'Yvain se rendit compte que son
maître était mort, il lâcha sa proie et se laissa alors dévorer. Le
vainqueur prit le cheval d'Yvain et partit en direction du château.
Là, il fut
accueilli par des hurlements de joie, ce qui l'étonna beaucoup. On
abaissa le pont pour lui et on le fit entrer comme un roi. Puis la Dame
s'avança, un manteau d'hermine sur les épaules, et lui prit les mains.
"Yvain, mon cher époux, tout le château est en liesse car vous
avez vaincu !" Le chevalier comprit alors que tous les gens du
château l'avaient pris pour Yvain car il n'avait pas encore enlevé son
casque et que son lion l'accompagnait. "Chère Dame, dit-il, je ne
suis pas votre époux" et il ôta son heaume. Laudine poussa un cri
et se mit à pleurer en s'arrachant les cheveux et en se lamentant :
"Ah ! mon pauvre époux, lui si vaillant et si galant ! Ah Dieu !
m'as-tu donc abandonnée ? Pourquoi m'enlèves-tu un si bon époux
?" Elle passa deux journées entières à hurler. Lunete essayait
tant bien que mal de consoler sa maîtresse.
Un soir, le
chevalier vint s'agenouiller auprès de Laudine. "Dame, je suis
désolé de vous avoir mise dans un tel état. La demande que je vais
vous faire va peut-être vous horrifier, mais votre beauté est si
grande que je ne pourrais partir loin de vous, c'est pour cela que
j'aimerais vous épouser.
- Grand Dieu ! s'écria la dame, ah oui, je suis horrifiée ! Vous,
le meurtrier de mon cher époux !" Et elle leva les bras au ciel.
"Lunete, faites sortir cet homme que je hais, et installez-le dans
une chambre !" Lunete fit ce que sa maîtresse avait commandé
puis, quand elle revint, elle lui demanda : "Dame, pourquoi ne pas
faire partir cet assassin plutôt que de lui offrir l'hospitalité ?
- Voyons, Lunete, ce chevalier a vaincu Yvain : il ferait
peut-être un bon mari ! Mais il faut que je réfléchisse..."
FIN |
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haut
| Elsa | Mathilde | Marie |
|
Une nouvelle aventure d'Yvain, par Mathilde B. |
Depuis qu'il
s'était réconcilié avec sa Dame, Yvain vivait heureux. Il portait de
riches habits en plumes de paon et petit-gris. Les murs de sa chambre
étaient recouverts de magnifiques tapisseries de couleur bordeaux.
Laudine et Lunete portaient de beaux bijoux et de belle robes. Les
journées d'hiver se passaient devant un bon feu, avec le lion. L'été,
ils se promenaient dans les jardins du château. Cette vie tranquille
leur plaisait bien.
Mais un beau soir
d'été, alors qu'Yvain et sa Dame marchaient dans les allées fleuries,
accompagnés par Lunete et le lion, une tempête effroyable éclata. Le
vent soufflait, il pleuvait, il grêlait, il neigeait même. Yvain
comprit qu'on avait versé de l'eau sur la fontaine. Les éclairs
déchiraient le ciel, la foudre abattait les arbres tout autour d'eux.
Le tonnerre grondait tellement fort qu'il leur était impossible
d'échanger la moindre parole. Ils rentrèrent donc. Malheureusement, à
l'intérieur, c'était presque pire que dehors. Le donjon et les murs tremblaient.
Les serviteurs et les gens du château étaient terrorisés.
Yvain décida
d'aller se battre pour défendre la fontaine. Un serviteur lui apporta
son armure. Il lui mit les éperons et le haubert, sur la coiffe le
heaume. Puis un autre lui présenta son épée, sa lance et son écu où
était représenté le lion. Avant qu'il parte, Laudine lui dit,
inquiète : "Que Dieu vous protège, mon fidèle époux ! Je m'en
vais faire préparer le piège pour le cas où vous seriez poursuivi.
- Adieu, ma Dame."
Puis il partit au
galop, son lion à ses côtés. Entre-temps, la tempête s'était calmée.
A présent, un très beau coucher de soleil se dessinait à l'horizon.
Quelques oiseaux chantaient et on avait peine à croire que quelques
instants plus tôt une terrible tempête avait éclaté. Yvain arriva
près de la fontaine. A côté se trouvait l'arbre qui en toute saison
garde ses belles feuilles. Yvain vit l'agresseur et s'élança, la lance
pointée vers lui. Ils frappèrent si fort que leurs lances éclatèrent
et ils furent obligés d'en venir à l'épée. Yvain se demandait qui
était son adversaire. Même s'il était parvenu à briser son haubert, il
reconnut que l'autre était de force égale. Le lion était resté dans un
taillis car il pensait que son maître n'aurait pas besoin de lui mais,
voyant celui-ci en détresse, le fidèle animal décida d'intervenir. Il
se précipita alors sur l'autre chevalier, qui aperçut le lion et le
frappa à la tête. Le valeureux félin dut se retirer du combat. Yvain
avait tout vu mais n'avait rien pu faire. Une colère folle s'empara alors
du courageux chevalier. Il désarma son adversaire et pointa son épée
sur lui. L'autre dit :
" Je t'en prie. Dieu m'est témoin que si tu me laisses la vie sauve,
je m'avouerai vaincu et je partirai.
- Je ne te tuerai pas, répondit Yvain, à condition que tu me dises
qui tu es, et que partout où tu iras, tu proclames que tu as été vaincu
par Yvain, le chevalier au lion.
- J'accepte. Je suis le fils de monseigneur Charles."
Yvain le laissa
partir. Il prit le lion sur son cheval et le ramena au château. Laudine
emmena son mari se reposer tandis que Lunete s'occupait du fidèle animal.
Un mois plus tard, grâce aux soins de la jeune fille, le lion était tout
à fait rétabli.
Quelques années
plus tard, Yvain et Laudine eurent un fils et Lunete aida sa maîtresse à
s'en occuper.
FIN |
professeur
: Daniel Jaillet
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haut
| Elsa | Mathilde | Marie |
Une nouvelle aventure d'Yvain, par Marie G. |
Dans
leur château près de la fontaine, monseigneur Yvain, sa dame Laudine
qu’il aimait tant, et leur tout jeune fils mangeaient un chapon rôti
et buvaient du grand vin. Une servante vint leur débarrasser la table.
Yvain était très fatigué car il avait chassé avec son lion toujours
aussi fidèle. Laudine et lui allèrent se coucher dans leur lit à
baldaquin. Elle resta longtemps éveillée, regardant les murs avec
leurs peintures de très grande valeur et pensant qu’elle était très
heureuse avec son chevalier. Elle finit tout de même par s’endormir.
Le lendemain matin, ils revêtirent leurs beaux habits :
monseigneur Yvain mit une robe vermeille avec une tunique et une chemise
plissée. Laudine, quant à elle, se vêtit d’une robe d’hermine et
d’un court manteau de soie.
Après avoir terminé de déjeuner, Yvain discuta avec Laudine et Lunete ;
celle-ci était restée la conseillère de Laudine. Soudain, une
terrible tempête se déclencha. Les murs s’ébranlaient, à croire
qu’ils allaient s’écrouler. Des morceaux de plafond avec des clous
dorés tombaient. Les coffres avec les habits se renversaient, les lits,
les tables, tout était par terre. Yvain prit Laudine dans ses bras pour
la protéger. Les gens du château qui regardaient par la fenêtre
virent les arbres se déraciner. Personne n’osait monter sur les toits
de peur qu’un arbre leur tombe dessus. Les habitants se mirent à
maudire leurs ancêtres qui avaient construit ce château près de cette
fontaine magique. Ils pensaient ne pas survivre à une tempête si
terrible, ils n’en avaient jamais vu de si forte. La personne qui
l’avait déclenchée le regretta pendant un certain temps. Elle vit un
arbre tomber à ses pieds, ce qui lui fit peur. La tempête finit tout
de même par se calmer. Tout s’apaisa de nouveau.
Yvain revêtit son haubert. Sa bien-aimée lui mit son heaume sur sa
coiffe. Son écuyer vérifia que l’épée était bien tranchante. In
ceignit son épée de manière à ce qu’elle ne le gêne pas pendant
le combat. Il monta fièrement sur son destrier. Lunete lui donna son écu
et sa lance. Laudine qui avait très peur pour Yvain lui demanda :
« Cher époux, êtes-vous sûr de vouloir aller à ce combat ?
- Oui, pour vous défendre, ma bien-aimée.
- J’ai quand même peur pour vous.
- Ne vous inquiétez pas, je serai prudent et loyal, je ne reviendrai
pas ici sans avoir tué le chevalier qui a déclenché cette tempête.
Et vous serez encore une fois fière de votre époux. »
Au moment où Yvain voulut partir, le lion le suivit. Yvain lui dit de
rester au château, sinon le combat serait inégal. Le lion, à contre-cœur,
resta au château. Il aurait aimé venir, au cas où son maître serait
en mauvaise posture. Yvain partit au galop. Il vit le chevalier, près
de la fontaine, et il l’interpella :
« Traître ! Vous avez osé toucher à ma fontaine. Regardez
comme vous avez dévasté ma forêt ! Vous serez châtié.
- Il faudrait déjà que vous y arriviez !
- Vous allez voir qui est le plus fort ! Ce combat sera à mort,
vous m’avez trop provoqué. Vous périrez par la lance ou l’épée.
Et vous vous en repentirez au plus profond de l’enfer.
- C’est vous qui périrez. Et moi je pourrai épouser votre femme et
vivre comme un seigneur à votre place.
- Commençons le combat et nous verrons bien, répondit monseigneur
Yvain. »
Un combat acharné commença. Ils s’élancèrent l’un contre
l’autre. Les lances s’entrechoquaient. Ils brisèrent leurs heaumes.
Leurs écus se fendirent et furent transpercés. Ils brisèrent leurs
lances. Aussitôt, ils prirent leurs épées et continuèrent à sa
battre sans faiblir malgré leurs blessures. Yvain se demandait qui
pouvait être ce chevalier si fort mais, pensant à sa dulcinée, il se
dit qu’il devait gagner à tout prix. Il reprit courage. Alors, de
toutes ses forces, Yvain brandit son épée et lui coupa la main.
Malheureusement, ce n’était pas celle avec laquelle l’agresseur
tenait son épée. Le sang coulait, mais l’homme s’en moquait. Il
voulait lui aussi gagner et épouser Laudine. Rien ne pouvait les séparer
de ce combat mortel. Avec son épée, le chevalier voulut couper la tête
d’Yvain, mais il échoua. Yvain profita de l’occasion et lui
transperça le cœur. Le sang coulait à flot mais Yvain avait gagné
une fois de plus. Il allait enfin pouvoir rentrer à son château et
garder Laudine. De plus, sa renommée augmenterait.
Il eut besoin encore de beaucoup de forces pour arriver à rentrer
au château à cause de ses blessures qui le faisaient terriblement
souffrir. Il réussit enfin, sur son destrier, en emportant aussi celui
du chevalier. Tout le monde était inquiet pour lui. Laudine
l’attendait avec impatience et priait pour lui, elle avait très peur,
son fils et Lunete étaient près d’elle. Quand elle l’aperçut qui
revenait péniblement, elle se précipita pour l’aider : ils
revinrent ensemble. Ses blessures étaient profondes. Elle le soigna
pendant trois mois. Enfin, il fut rétabli, ils décidèrent de fêter
la victoire d’Yvain. L’atmosphère fut aux chants et aux musiques.
Il y avait des troubadours, jongleurs… Ils mangèrent et burent tous
à la santé d’Yvain, leur protecteur, qui était toujours vivant.
FIN |
professeur
: Daniel Jaillet
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